Le chant des couleurs


Un Russe

1. Nicolas de Staël naît à Saint- Pétersbourg, en Russie, en 1914. Son enfance n'est pas très heureuse : elle est marquée par la Révolution russe de 1917 et par la mort de ses parents. Avec ses sœurs Olga et Marina, Nicolas est recueilli par des amis à Bruxelles. A l'école, Nicolas est fâché avec l'orthographe, mais c'est un élève brillant. Il décide d'être artiste et commence à étudier le dessin et la peinture.

Un voyageur curieux

2. Nicolas aime voyager et écrire. En 1935, il est en Espagne avec un ami. Il ramène de ce voyage de très belles aquarelles et beaucoup de souvenirs. «Tolède est magnifique. Nous campons au bord du Tage... On finit par lire l'heure à l'ombre des rues comme de vieux Tolédiens et l'art du Greco n'a plus de secrets pour nous...» raconte-t-il dans une de ses nombreuses lettres.

Les maîtres anciens

3. L'année suivante, en Italie, Nicolas de Staël admire les primitifs italiens. «J'aime m'approcher, voir, copier Titien, les beaux primitifs, et si parfois ces toiles ne sont pas aussi près de mon cœur que les Flamands ou les Hollandais, j'apprends énormément» écrit-il en 1936. Mais voilà que Nicolas de Staël change à nouveau de pays et se retrouve en France. C'est désormais là qu'il fera toute sa carrière.

Compositions

4. Pourtant, Nicolas de Staël s'engage sur une autre voie que celle des maîtres anciens. A son époque triomphe un courant de peinture qui est celui de l'abstraction. Les peintres ne représentent plus la réalité. Ainsi, après la Deuxième Guerre mondiale, Nicolas de Staël peint des tableaux qu'il appelle pour la plupart Composition: ce sont des enchevêtrements de lignes et de traits brisés, aux couleurs sombres... mais si tu les regardes bien, tu verras déjà des gris qui chantent et qui annoncent un grand talent de coloriste.

Un style personnel

5. Mais de Staël ne veut pas être un peintre abstrait. Aux lignes compliquées succèdent des carrés qui sont comme une mosaïque de couleurs sur la toile, et bientôt ces carrés se transforment à leur tour en ... footballeurs, une belle toile qui date de 1952 : Nicolas de Staël, avec un style bien à lui, est revenu à la figuration. Avec quelques touches de couleurs, Staël peut tout représenter: des bouteilles, des pommes et même un orchestre ou des personnages de ballets. Armé de sa palette, de Staël sort désormais de son atelier pour faire le plein de lumière.

Peinture en relief

6. Sur la côte normande ou autour de Paris, il réalise des paysages en plein air: marines ou études de ciels. Souvent l'horizon est bas, comme sur les tableaux des peintres hollandais qu'il admire. Il aime la matière, les couches de peinture épaisse qu'il applique avec un couteau et qui lui permettent de jouer avec les superpositions de tons. Sa peinture est en relief, tant il met de matière!

Le Midi

7. Nicolas de Staël est attiré par la Méditerranée. En 1953, il achète une camionnette et, un carnet de croquis à la main, part sillonner l'Italie. Il emmène sa seconde femme, Françoise Chapouton et leurs enfants. Il visite la Sicile qui le fascine. En 1954, il décide de s'installer à Antibes dans le Midi. «La lumière est tout simplement fulgurante ici, explique t il, ... Je consomme de la couleur en quantité…».

Désespoir

8. Que se passe-t-il alors dans la tête de Nicolas de Staël ? Il doute. Sa manière de peindre change encore une fois, il emploie des couleurs fluides, des «jus» transparents. Mais il n'est pas satisfait. Il a l'impression d'être arrivé au bout de son chemin. Dans un accès de désespoir, il se jette du haut de la terrasse de son atelier sur les remparts d'Antibes et meurt le 16 mars 1955.